A six jours du premier tour, nous dansons sur un volcan.
Nous nous sommes bien amusés avec nos querelles gauloises et nos polémiques dérisoires, et nous nous sommes goinfrés de sondages comme s'ils ne nous avaient jamais trompés sur la marchandise. Alors bien sûr, c'est la vie d'une présidentielle, c'est le flamboiement des passions, c'est l'ivresse des emballements. Mais dans quelques mois, dans quelques semaines, dans quelques jours, que restera-t-il de tout cela, sinon la poussière des vanités ?
Tous responsables ! Candidats, sondeurs, journalistes, citoyens : nous nous sommes offert une distrayante parenthèse dans la morosité de cet inquiétant début de millénaire. Entre l'hypermarché des promesses et le cirque des contorsionnistes, le jeu l'a emporté sur la réflexion. La stratégie sur le sens. Le calcul sur la franchise. C'est humain, et d'une certaine façon sympathique.
Mais ce matin comment ne pas avoir le sentiment d'avoir laissé passer une chance d'être à la hauteur des vrais enjeux de notre siècle ? Les enfants s'intéressent au spectacle - c'est la cour de récré tous les jours - mais ils nous en voudront peut-être un jour de ne pas avoir affronté les défis de leur avenir quand il le fallait. La crise du courage aurait elle une telle force d'inertie ?
Cette campagne, interminable, a oublié l'essentiel. Le monde qui nous entoure. Un monde dont la France dépend et auquel, puissance moyenne mais nation universaliste, elle a encore quelque chose à dire... Nous avons préféré nous regarder le nombril dans une sorte de splendide isolement bleu-blanc-rouge. Le modèle de développement d'une planète en péril, le regard sur l'immigration et l'indispensable solidarité avec le Sud, la nécessité de l'Europe, les dangers d'une humanité à deux, voire trois vitesses, et, sous nos yeux cette fois, la place des défavorisés dans une société dominée par la compétition, la limite des compromis avec le cynisme de l'économie : toutes ces questions primordiales dépassant toutes les autres en urgence, n'ont servi, au mieux, que de toiles de fond... Nous n'avons pas avancé.
Le quotidien, bien sûr, n'est pas subalterne. Mais ce n'est pas un nouveau président qui va créer des emplois, ni faire justice, ni ramener la confiance d'un coup de baguette magique. Une fois de plus,il a laissé croire aux Français que le politique pouvait trouver des solutions à tout.Les français ne sont pas dupes et, au delà du suspense, leur indécision est peut-etre bon signe.Ils vont voter Ségolène