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LA REFORME TERRITORIALE

La réforme territoriale

 

 

 

   

Marc Daunis - Sénateur-maire  socialiste de Valbonne Sophia-Antipolis (06)-

La réforme n’est pas que politique ou administrative, elle est aussi sociale et humaine.

La puissance publique assume un rôle fondamental dans notre société au travers de l’action de l’Etat et des collectivités territoriales.

Emploi, logement, santé, défi écologique et social… son intervention s’est confirmée comme impérative pour contrer une logique strictement financière qui ne connait fondamentalement que la recherche du profit maximal et se moque de l’intérêt général.

Il nous faut donc promouvoir un Etat garant de la solidarité dans et entre les territoires, un Etat stratège qui prépare l’avenir. Mais à ses côtés, pour remplir les missions d’égalité, de proximité, de garantie des services publics, de solidarité, les collectivités territoriales doivent être autonomes et responsables. La décentralisation, initiée par les socialistes il y a 25 ans, a fait ses preuves. Elle a convaincu une grande majorité de nos concitoyens en améliorant considérablement leur vie quotidienne et en contribuant amplement au développement de notre pays.

Un acte III, une nouvelle étape, un renforcement de la décentralisation est souhaité. La réforme des collectivités locales est nécessaire ainsi que l’amélioration constante des services publics. Mais cela ne peut pas être le prétexte de manœuvres politiciennes ou d’une remise en cause de notre modèle républicain de société. Les réformes en cours n’ont pas un simple caractère politique ou administratif. Elles se doivent d’être avant tout humaines par leur impact sur la vie quotidienne de nos concitoyens !

Prenons par exemple la suppression de la taxe professionnelle.

Pour la méthode, l’annonce brutale de cette suppression par le président de la République, un soir à la télévision, a surpris les ministres du gouvernement eux-mêmes ! Et ne parlons même pas de la nécessité d’une concertation préalable avec les élus locaux, alors que la taxe professionnelle représente - ou plutôt représentait - une ressource fiscale non négligeable d’environ 29 milliards d’euros.

Puis après un bricolage, à la hâte, de compensations partielles pour les collectivités territoriales, le même résultat est obtenu in fine : un « cadeau » accordé aux entreprises et une « punition » pour les ménages !

Mais au-delà de la méthode, on voit surtout poindre les conséquences graves que peuvent avoir sur les ménages des réformes qui semblent, à première vue, lointaines et très institutionnelles.

Jusque-là, la répartition de la charge des impôts locaux entre les ménages (49 %) et les entreprises (51%) était quasiment équilibrée. Après la réforme, les ménages assument près de 70 % des impôts locaux contre 30 % pour les entreprises.

Dès lors, deux solutions seulement s’offrent aux collectivités territoriales pour compenser le manque à gagner : ou la qualité des services publics rendus à la population diminuera, faute de ressources suffisantes pour entretenir les infrastructures et payer les personnels ; ou le niveau des rentrées financières devra être maintenu et les impôts locaux augmentés pour les ménages qui, au final, règleront la facture !

Nous ne pourrions plus échapper à cette triste réalité qui, malheureusement, nous frappe déjà : les plus vulnérables restent les premières victimes de la politique gouvernementale.

L’Etat n’est en aucun cas « obligé » de sacrifier les services publics, seul bien et seule protection de ceux qui n’ont rien ou si peu.

Permettez-moi ici de citer deux exemples chiffrés : L’argument financier pourrait être légitime au regard du déficit public actuel. Mais les mesures financières proposées sont avant tout la traduction de choix politiques. Le non remplacement d’un fonctionnaire sur deux, cher au gouvernement actuel, rapporte 500 millions d’euros à l’Etat. En parallèle, la baisse de la TVA sur la restauration coûte 3 milliards d’euros à l’Etat !

Il s’agit donc bien d’un choix délibéré pris en faveur des entreprises au détriment des enseignants, personnels de santé, juges, etc.

Autre exemple sur un argument financier qui ne tient pas : les élus locaux coûteraient trop chers. Sous couvert d’une démagogie intolérable et malsaine, on justifie la réforme des collectivités territoriales et la diminution du nombre d’élus de terrain. Or, n’oublions pas que les indemnités des élus locaux ne représentent, en moyenne, que 0,2 % des budgets des collectivités territoriales.

La réforme territoriale dans sa version actuelle affaiblit la démocratie de proximité, pilier de notre système démocratique. Elle dissout encore davantage le lien de confiance difficilement maintenu entre les populations et les élus. La République et son modèle d’organisation ne sont pas qu’un héritage. La République est aussi une promesse, un espoir qu’il faut faire vivre. Oui bien sûr, il faut réformer, mais en allant au contraire plus en avant dans la décentralisation. Clarifier, simplifier et moderniser, ce n’est pas affaiblir la démocratie de proximité, c’est plutôt faire confiance aux élus locaux et donner aux populations des moyens supplémentaires pour s’exprimer.

Alors osons la vraie modernité : celle de la concertation, celle de la proximité, de la solidarité et de l’égalité, celle du renfort de notre démocratie !

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