La démocratie a toujours été bouleversée dans ses fonctionnements par le progrès technique, sans que ses finalités en soient altérées. Au XIXème siècle, c'est la naissance de la presse moderne qui a contribué au développement de la République. Avec la télévision et l'internet, nous assistons à l'instauration d'une démocratie électronique qui modifie nos comportements. Les primaires citoyennes en ont été une étape importante et un accélérateur.
D'abord, la télévision a joué un rôle déterminant là où, auparavant, il n'y a pas si longtemps, c'étaient les débats internes au parti qui décidaient du résultat. Et puis, l'information sur les modalités du vote a circulé sur le net beaucoup plus qu'à travers les sections, les affiches et les tracts. Enfin, les militants ont fait une drôle de découverte, le stylo électronique qui élimine les possibilités de fraude. Jamais le parti socialiste n'aura été dépossédé à ce point des moyens du militantisme classique, en pleine mutation.
Depuis les années 30 du siècle dernier, la scène politique française avait ses figures familières : le journal d'opinion vendu à la criée, le militant distribuant ses tracts sur le marché, le collage nocturne des affiches, le boîtage dans les quartiers, la réunion publique dans une salle municipale, un préau d'école ou l'arrière d'un café. Depuis quelques années, nous sentions que ces vénérables rituels avaient pris du plomb dans l'aile. Aujourd'hui, on peut dire que l'oiseau est agonisant.
Bien sûr, rien ne meurt jamais vraiment. Tel le Phénix il y aura des survivances, sous forme de folklore. Le distributeur de tracts sera regardé comme les enfants s'amusent devant les autruches au zoo. Le colleur d'affiches sera vu comme quelqu'un qui dégrade inutilement l'environnement . La réunion publique qui ne regroupe que ceux qui sont déjà convaincus (quand la salle n'est pas vide ...) fera plaisir à ses seuls organisateurs. Mais l'essentiel se jouera ailleurs, sur les réseaux sociaux : c'est ce que les primaires citoyennes ont démontré avec éclat. Et nous ne sommes qu'au début d'un processus de fond ...