Ce soir , les Rémois plongeront dans la cuvette brûlante du stade Armand-Cesari de Bastia. Une enceinte chargée d'histoire et à la passion souvent débordante.
C'EST l'histoire d'une passion qui, parfois, dépasse la raison. C'est l'histoire d'une fusion qui tourne à l'effusion. C'est l'histoire d'un peuple bleu qui porte son équipe à bout de bras jusqu'à la dernière goutte de sueur.
Furiani, commune du département de la Haute-Corse. Un petit port tranquille d'à peine 40.000 âmes. Et un stade, Armand-Cesari, inauguré en 1932. Chaude cuvette, ambiance colorée, citadelle imprenable. C'est entre ces quatre tribunes (1) qu'est née la légende des « Lions de Furiani », auteurs de l'épopée européenne de 1978, qui vit les célèbres Djazic, Zimako, Felix, Rep, Lacuesta, Papi, Krimau… donner la fessée aux grands de Lisbonne, Newcastle et du Torino.
On les appelait la bande à « Cahu », du nom de leur atypique coach, Pierre Cahuzac, meneur d'hommes aux méthodes particulières. Un jeu de sueur et de sang, collant aux aspirations d'un public chaud bouillant réclamant de leurs joueurs qu'ils se surpassent, qu'ils glorifient leurs couleurs.
Près de 35 ans plus tard, le décor n'a pas changé, les exigences sont restées les mêmes. « Forza Bastia, Eviva Corsica » chantaient lundi à Monaco les 1.036 supporters corses qui avaient pris place dans les tribunes du stade Louis II de Monaco.
Terre de sang
La sixième année de Bastia en Ligue 2 sera forcément la dernière. Après onze saisons consécutives en Ligue 1 entre 1995 et 2004, le Sporting n'a plus de temps à perdre. Considérée comme étant la meilleure équipe du championnat, elle s'est installée pour la troisième fois dans le fauteuil de leader, à la veille de recevoir le Stade de Reims.
« Tous à Furiani, le stade doit être plein, il faut une ambiance de L1, car nos gars sont prêts pour le combat et la victoire », peut-on lire dans le journal local. La tâche des Rémois ne s'annonce pas facile.
Invaincu à domicile, le SCB envisage de transformer l'essai monégasque. La fierté corse n'est pas une utopie. Au pays de la Testa Mora, on se réfère en permanence à l'histoire. Ainsi, après la catastrophe de 1992 (2), Furiani restera à jamais une terre de sang.
Même si un match se gagne d'abord sur le terrain, la pression populaire est capable de décupler les énergies. Au bout du tunnel menant au terrain, une plaque exige un devoir de mémoire : « Per voi vinceremu » (Pour vous, nous vaincrons).
La pression d'entrée
Notre confrère troyen, Anthony Lacaille, qui a assisté au naufrage corse de l'Estac (5-1) le 4 février dernier, confirme ce particularisme. « On sent un vrai engouement. Le public est présent et pressant. Le match se disputait l'après-midi, l'ambiance était différente. Chaude, mais calme ».
On ne se déplace pas au stade Armand Cesari la fleur au fusil. On y vient d'abord pour résister. La répartition des buts marqués par le Sporting cette saison, met en évidence l'énergie déployée en début et en fin de match. Dès le coup d'envoi, il faut s'attendre à supporter un pressing étouffant, ce qui paralyse souvent l'adversaire. « Troyes a été mené 2-0 au bout de 14 minutes de jeu, sans avoir concédé d'occasions franches », rapporte notre confrère aubois.
Un vrai test aux senteurs de Ligue 1 pour le Stade de Reims qui, depuis son retour en L2, s'est imposé deux fois en quatre productions sur cette pelouse mythique.
Gérard KANCEL
(1) A l'occasion du centenaire du club le 18 décembre 2005, les quatre tribunes ont été baptisées Claude Papi (Nord), Pierre Cahuzac (Ouest), Victor Lorenzi (Sud) et Jojo Petrignani (Est).
(2) Avant le coup d'envoi de la demi-finale de la Coupe de France, le 5 mai 1992, l'effondrement d'une tribune provisoire a coûté la vie à 18 spectateurs et fait plus de 2.500 blessés.