L'issue du conflit à ArcelorMittal est une victoire pour le gouvernement et les salariés, si l'on veut bien reconnaître honnêtement les faits . Que voulait Mittal ? Fermer le site de Florange, licencier tout le personnel et investir ailleurs. Qu'a obtenu le gouvernement ? Que le site reste ouvert, qu'aucun licenciement n'ait lieu, que 180 millions d'euros soient investis. C'est une belle victoire, car les faits sont têtus, comme disait Lénine, et les mots ont un sens.
Pourtant, qu'est-ce qui laisse croire à certains qu'il y a une défaite ? On retient le mot du responsable local de la CFDT, qui qualifie Ayrault de "traître", mais on oublie de dire que d'autre se déclare "satisfait". La nationalisation n'a pas été retenue ? Montebourg a été franc et honnête dès le début : pour forcer Mittal à un accord, il faut brandir cette possibilité. L'accord s'est fait, il est à l'avantage des salariés, la nationalisation ne se justifie plus !
Mais si Mittal ne tient pas ses engagements ? Non, on ne fait pas de la politique, on ne dirige pas un grand pays avec des "si". Ou alors on doute de tout et on ne fait plus rien. Surtout, l'hypothèse de la nationalisation demeure en cas d'éventuel reniement. Il n'en reste pas moins que la déception et l'inquiétude sont là. Mais dues à quoi ?
Il y a, je crois, ce mot de "nationalisation", prononcé par le ministre, qui a eu un effet magique, comme s'il pouvait immédiatement tout régler : non, et même si nationalisation il y avait eu, elle aurait été temporaire. Jamais le gouvernement n'a eu à l'esprit d'administrer le site de Florange et d'en garantir de cette façon l'emploi et la pérennité ! Montebourg aurait-il dû s'abstenir d'utiliser le mot, pour ne pas susciter de faux espoirs ? Mais non, puisque son évocation était un élément fondamental et boostant dans la négociation !
Autrefois, quand ce type de négociation se passait à huit clos, rien ne filtrait, on ne connaissait que le résultat final. Aujourd'hui, tout est médiatisé, sous l'oeil de la caméra, d'heure en heure : un mot et c'est l'emballement médiatique, hors contexte et en dehors de toute raison. Après le tourbillon des mots et des images, il reste l'amertume, sur fond de malentendu.
C'est la révolution culturelle du compromis que François Hollande a lancé et que le parti socialiste doit relayer sur le terrain, avec force pédagogie, en saluant et expliquant aujourd'hui la victoire de Florange.