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CE QUE CANNES DOIT A JEAN ZAY

Suite à l'émission sur France Inter "Là bas si j'y suis " j'ai été  étonné d'entendre Mermet faire l'éloge de Jean Zay militant socialiste ministre sous dans le cabinet Blum et résistant .Quant à Mélenchon la haine qu'il a contre le PS lui fait dire que le Festival de Cannes a été créé par la Cgt  et le PC . 

L'article de Libé çi-dessous rétablit la vérité

 

D'aprés Libération, lundi 27 mai.

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Les festivaliers qui arpentaient, hier encore, la Croisette, les starlettes en quête de célébrité et Steven Spielberg, qui présida cette année le jury de la compétition officielle, ignorent sans doute qu’ils doivent leur présence commune, sur la Côte d’Azur, comme à chaque fin du mois de mai, à Jean Zay.

Qu’ils se rassurent, même Jean-Luc Mélenchon ne le savait pas. Alors qu’il se trouvait «en mission» à Cannes, le dirigeant du Parti de Gauche déclara que le festival devait sa création, en 1946 à «la CGT, [aux] communistes ». Si la première édition s’est effectivement tenue en 1946, la date de création du festival est antérieure au déclenchement du second conflit mondial et la décision fut prise par le gouvernement du Front Populaire. C’est plus précisément au ministre radical de l’Education nationale, Jean Zay, qu’il revint d’attribuer une telle initiative.

Lors de la dernière campagne présidentielle, le candidat François Hollande, au cours d’un déplacement à Orléans, sur le thème de l’éducation, avait salué son œuvre réformatrice. Chaque année, depuis 2005, le Parti radical de gauche organise un prix littéraire, le Prix Jean-Zay, qui récompense un ouvrage consacré aux thèmes de la laïcité et des valeurs républicaines. De même, le 23 mai une plaque rendant hommage à son action a été dévoilée au sein du Palais des festivals.

En dépit de ces manifestations, cette figure politique demeure aujourd’hui trop méconnue. Il convient de remédier à cette injustice de l’histoire et de remettre en lumière des actions, un héritage et un destin hors du commun.

Car que dire de la marque imprimée par Jean Zay, tout au long d’une carrière qui culmina lors de ces trois années passées au ministère de l’Education nationale et des Beaux-Arts (une longévité ministérielle assez rare en ces périodes d’instabilité) ? Elle fut celle d’un visionnaire. Nous ne comptons plus les politiques initiées ou menées entre 1936 et 1939, par un ministre nommé alors qu’il n’avait que 32 ans : réforme de l’enseignement, prolongation de la scolarité de 13 à 14 ans, ouverture de nombreuses classes, instauration de cours d’éducation physique et de l’orientation professionnelle, promotion de l’enseignement technique. Son action a également permis la création des Crous, du CNRS et préfigura celle de l’ENA.

En matière culturelle, son action de promotion et de démocratisation des arts témoignent de son volontarisme qui se manifeste par la modernisation des structures, la rénovation de la production et l’appui aux créateurs. Il soutint notamment la création de la Cinémathèque française et déposa un ambitieux projet de loi sur le cinéma, en mars 1939, qui, du fait de l’éclatement de la guerre, ne sera jamais débattu. C’est dans ce contexte d’effervescence qu’en 1938 lui parviennent de sombres nouvelles du plus grand festival de cinéma de l’époque, la Mostra de Venise. L’Italie de Mussolini, pour symboliser son rapprochement avec Hitler, a décidé qu’elle serait inaugurée par Joseph Goebbels. Pire : alors que le jury hésite (Autant en emporte le vent est en compétition…) le Duce exige qu’une «coupe Mussolini» soit accordée par la Mostra aux Dieux du Stade, le film de propagande nazie de Leni Riefenstahl. Jean Zay, révolté, décide donc de créer un festival international concurrent.

La décision de principe est prise en 1938. Après quelques hésitations – Biarritz a été en compétition ! -, la ville de Cannes est choisie. La date du premier festival est fixée : ce sera du 1er au 20 septembre 1939. Une manifestation qui doit être présidée par Louis Lumière et à laquelle doivent participer Gary Cooper et Tyrone Powell… Mais le 1er septembre, jour prévu pour l’ouverture du premier festival de Cannes, les troupes nazies envahissent la Pologne. Le 2, Jean Zay démissionne de son poste de ministre pour devenir soldat.

De ses années de formation à Orléans aux bancs de l’Assemblée, du radical «jeune Turc» au ministre du Front populaire, du Massilia à l’inique procès de Riom, son emprisonnement et son exécution par la milice… Jean Zay incarne un pan de l’histoire du Front Populaire ; de l’histoire de la gauche, de l’histoire de France, jusque dans ses heures les plus sombres.

Pour ce que Cannes doit à Jean Zay, pour ce que la France doit à Jean Zay, œuvrons pour le transfert de ses cendres au Panthéon. Une telle décision serait la juste reconnaissance de la Nation à un homme, à un parcours et à des engagements. Le symbole serait d’autant plus fort, alors que nous célébrerons en 2014, le soixante-dixième anniversaire de sa disparition.

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