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ET LA LAICITE BORDEL

En adoptant  une loi qui interdit les signes religieux dans les crèches privées à financement public, l'Assemblée nationale contrevient à l'idée que je me fais de la laïcité, qui est un principe de liberté, et pas un principe d'exclusion (seul le Front de gauche s'est abstenu, avec lequel pour une fois je suis d'accord). Cette dérive dangereuse est le résultat de la funeste loi de 2004, appliquée à l'école publique, que j'ai souvent dénoncée sur ce blog, dont je souhaite l'abrogation. Mais le climat de xénophobie et d'anti-islamisme qui souffle en France ne se prête hélas guère à cette décision.

Contraire à la laïcité à la française, cette loi étend au domaine privé ce que nos grands ancêtres, authentiquement laïques et républicains, réservaient au seul domaine des institutions : la séparation des églises et de l'Etat, la stricte neutralité religieuse de celui-ci. Depuis 2004, c'est une laïcité dénaturée, pervertie, liberticide qui s'est mise en place, en étendant son principe à toute la société, visant implicitement une communauté, les musulmans, les immigrés et leur descendants. Etonnez-vous que l'extrême droite applaudisse et se prétende à son tour furieusement laïque.

Ma pauvre laïcité, qu'a-t-on fait de toi, en mettant dans ta bouche des paroles qui te sont étrangères !

Savez-vous que la loi adoptée était au programme départemental du Front national ? Savez-vous qu'elle a été initialement proposée par le PRG, à la suite de l'affaire Baby-Loup, et que ses dispositions premières frappaient n'importe quelle structure de jeunesse, à tel point que le mouvement scout lui-même se voyait menacé ? Mais qu'est-ce qui peut donc amener des hommes de gauche, de tradition républicaine, à se fourvoyer dans une caricature autoritaire, punitive et intégriste de la laïcité ? J'ai une réponse à proposer : la gauche française, en voie accélérée de social-démocratisation  se cherche un revival identitaire, qu'elle croit trouver dans une laïcité totalisante, sinon totalitaire.

Dans ce débat, je me trouve en parfait accord avec Jean-Louis Bianco, président de l'Observatoire de la Laïcité. Je vous renvoie à son remarquable entretien au quotidien La Croix, du 15 mars, dont je vous cite les dernières phrases : "On met le doigt dans un engrenage dramatique. On va ensuite légiférer sur les mamans qui accompagnent les sorties scolaires, sur l'université, sur les usagers des services publics, sur l'entreprise ... Certains veulent normer la société, ce qui est le contraire de la liberté et de la diversité dans le monde moderne".

Il y a quand même des socialistes de coeur, d'intelligence et de fidélité, qui nous sauvent de la honte à se dire laïque, quand on voit, effaré, ce qu'on fait de la laïcité, défigurée, méconnaissable, étrangère à elle-même. Oui, la laïcité est en danger, non plus comme autrefois à cause de ses adversaires déclarés, mais de ses partisans infidèles.

En 1968, quand les chars soviétiques ont envahi la Tchécoslovaquie pour soi-disant défendre le socialisme, les murs ont vu s'afficher spontanément ce slogan : "Lénine, réveille-toi, ils sont devenus fous !" Devant les chars d'assaut de la pseudo-laïcité sectaire, j'ai envie aussi de m'écrier : Jules Ferry, Jean Macé, Ferdinand Buisson, réveillez-vous, ils sont devenus fous !

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