D’atermoiements en renoncements, voilà donc que tombe le bouclier fiscal. Dénoncé depuis longtemps, ce cadeau aux plus fortunés aura donc coûté cher au pays et, plus encore, aux contribuables, du moins à ceux qui n’en bénéficiaient pas. Comme n’importe quelle mesure fiscale, sa création au lendemain de l’élection présidentielle se voulait d’abord un signe politique adressé à ceux qui n’auraient pas à travailler plus pour gagner plus.
De 246 millions d'euros pour 15 066 bénéficiaires en 2007, l’an dernier le pavois sarkosien aura privé les finances publiques de 700 millions. Qui plus est, plus de 99% des sommes restituées à une minorité de privilégiés ont bénéficié à des contribuables déjà assujettis à l'Impôt de Solidarité sur la Fortune. Pour moins d’un millier de Français, il s’est, en effet, traduit par un chèque moyen de 376 000 euros.
Corollaire de l’enterrement du bouclier, la suppression de l’ISF n’est cependant pas neutre. De fait, la seconde mesure ne sert qu’à compenser la première en exonérant le patrimoine immobilier. La France voudrait ainsi supprimer l’inégalité selon laquelle les propriétaires de l’Hexagone seraient plus taxés qu’ailleurs. C’est ignorer l’imposition britannique ou feindre d’oublier les pourcentages appliqués de l’autre côté de l’Atlantique.
Le relèvement du seuil d’imposition à 1,3 million d'euros n’avantage pas que le malheureux pêcheur de l’île de Ré.
En effet, selon une note confidentielle adressée à une vingtaine de parlementaires UMP triés sur le volet, en 2008, les cent Français les plus riches se sont partagés un revenu fiscal de 2,87 milliards d’euros, quasi exclusivement lié à leur capital et, plus précisément encore, obtenu grâce à des plus-values mobilières.
Qui pourrait donc penser que la nouvelle réforme fiscale les désavantagera ? D’ores et déjà, avec cette nouvelle réforme, le manque à gagner pour les caisses de l’Etat est évalué à 1,5 milliard d'euros. Si un bouclier disparaît, d’autres protections demeurent et la main droite gouvernementale rendra à ces riches privilégiés ce que la main gauche leur aura (partiellement) enlevé.