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LE CHOC DES PHOTOS

Pour moi  c'était  l'honneur de la presse française de n'avoir pas publié  la photo d'un enfant mort, sur une plage, après avoir tenté comme bien d'autres migrants de rejoindre à la nage l'Europe. Les journaux du continent n'ont pas eu cette pudeur. Nos réseaux sociaux, bien sûr, n'ont pas hésité : mais est-ce qu'on peut attendre d'une auge à cochons qu'elle soit propre ?

Indécence, oui, car il y a des choses, dans la vie, qu'on ne montre pas, surtout à l'insu de ceux qui sont ainsi photographiés : un corps nu, un défunt. Le sexe et la mort sont des tabous, dans n'importe quelle civilisation, et qui doivent le rester. Sommes-nous encore civilisés ? Il y a quelques semaines, Paris Match a publié des photos de migrants en train de se noyer en Méditerranée : où sont les barbares ? La honte s'est-elle emparée des lecteurs, des voyeurs du célèbre magazine ?

Cependant, n'avons-nous pas le droit d'être informés, y compris des horreurs de ce monde ? Oui, évidement, mais pas de cette façon-là : la photo de cet enfant, dont on ne respecte même pas les derniers instants, l'absence inhumaine de sépulture, cette photo-là n'apporte aucune information qu'on ne connaisse déjà. Elle est inutile, gratuite. Sa diffusion, pour cette raison, est obscène.

Les mauvaises intentions ne sont jamais à court d'argument : cette photo n'est-elle pas au service du Bien, en vue de faire réagir les populations, de les amener à un peu plus de compassion à l'égard des migrants ? Non, la générosité ne repose pas sur l'émotion, surtout pas sur celle-là. Quant à l'accueil politique de ces pauvres gens , c'est une affaire de raison, pas de sentiment.

L'usage public de nos émois est une manière détestable, une hypocrisie, une manipulation. Les sentiments n'ont de sincérité que dans la sphère privée, de personne à personne. Etalés au grand jour, ils deviennent un mensonge, une comédie. Plus trivialement, nos indécentes images permettent de gagner de l'argent en exploitant la vicieuse curiosité qui est en chacun d'entre nous. La presse française, avait  en tout cas, jusqu' à résisté à cette bassesse .

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