Je soutiens la grève à la SNCF !
Pendant deux jours, on ne va entendre que cela : prise d'otage des usagers, privilège des cheminots qui abusent du droit de grève, conséquences économiques pour tout le pays... Bref, la rengaine habituelle de ceux qui travaillent pour Bouygues, Hachette ou Lagardère. Comme si le pays était divisé en deux, ces fainéants de cheminots d'un côté, et le reste de la France qui travaille de l'autre.
Mon père était cheminot et je me souviens des longues grèves de la SNCF dans les années 50 et des commerçants qui donnaient à ma mère de quoi nous nous nourrir
D'abord, une petite remarque. Ceux qui râlent contre les grèves dans cette entreprise publique, sont les mêmes qui se plaignent des retards, des pannes, voire des annulations de train, toutes choses que les syndicats dénoncent depuis des années et qui ne font que s'amplifier. Pourquoi ? Parce que la direction de la SNCF est aujourd'hui dans une logique de rentabilité qui conduit à délaisser tout ce qui ne rapporte pas, au mépris souvent de la qualité du service et de la sécurité des passagers.
Cela a des traductions concrètes sur notre quotidien : toutes les petites gares ferment, des villes, des territoires entiers ne sont plus desservis, et dans le même temps, l'entreprise publique investit en masse sur le TGV. Tout cela contribue à la désertification des territoires, et à une inégalité face aux transports.
A la SNCF, comme à la Poste ou à EDF, ce n'est pas qu'une question de salaires ou de conditions de travail qui se dégradent, c'est de l'avenir du service public qu'il s'agit. Du moins de la notion d'un service public à la Française, au service de tous, partout, sans obligation de résultats économiques. Il est intéressant de constater que les régions les plus pauvres économiquement, Auvergne, Limousin, Franche-Comté, sont aussi les plus mal desservies en transports. Il en est de même dans les grandes villes pour tous les quartiers défavorisés ou en plus de ne pas y avoir de travail, il n'y a plus de services publics ni de transports (pour exemple, la ville de Clichy sous bois, 25 000 habitants, n'a ni commissariat, ni gare). Certes, il est évident que cela coûte énormément d'argent de construire et de maintenir des lignes dans des régions éloignées, ou dans des quartiers ou les problèmatiques sociales provoquent des conditions de travail dégradées. Pour autant, l'absence de transports dans ces endroits multiplie les problèmes. Rappelons que la constitution et la loi donc, imposent le principe d'égalité.
De plus, le dossier épineux en ce moment à la SNCF est celui du fret, lequel perd beaucoup d'argent. A l'heure où les questions environnementales prennent une place importante dans le jeu politique, il est curieux de voir que le gouvernement se désengage massivement de ce qui pourrait être un magnifique outil de lutte écologique : le ferroutage. Evidemment, cela demande des investissements, une vision d'avenir pour la politique des transports de ce pays, mais il est difficile à la fois de débloquer des milliards pour les banques et de défendre le développement durable.
Enfin, je termine cet article par quelques petits rappels juridiques. 1) Les journées de grève ne sont pas payées, pas plus à la SNCF qu'ailleurs, et au vu des salaires dans l'entreprise publique, je ne crois pas que ce soit de gaieté de coeur que les cheminots cessent le travail 2) La loi oblige les syndicats à déposer un préavis avant la grève, lequel préavis doit servir à la direction pour négocier, laquelle direction ne fait visiblement pas, préférant jouer la division entre usagers et cheminots