La crise migratoire qui se joue sur l’île italienne de Lampedusa, consécutive aux révolutions dans le monde arabe ,a pris un tour dramatique avec le naufrage cette semaine d’un bateau transportant environ plus de 200 personnes qui ont disparu en Méditerranée suite au naufrage d’un chalutier parti de Libye probablement en direction de Lampedusa .
Le 6 avril dernier, un précédent naufrage avait fait plus de 150 victimes. Selon l’ONU, plus de 1 200 personnes fuyant la Libye ont trouvé la mort ou sont portées disparues depuis le début des violences en Libye.
Probablement ces personnes sont-elles majoritairement des réfugiés, retenus depuis des années par le régime du colonel Kadhafi, qui fuient la Libye et sont en quête de la protection internationale à laquelle ils ont droit.
Toute l’Europe tremble après 17 décès faussement attribués au « concombre tueur »,mais c’est l’indifférence qui prévaut autour de ces centaines de victimes en Méditerranée.
Alors qu’au sein de l’UE, les outils et les moyens existent, comme les mécanismes de réinstallation des réfugiés que les États refusent d’activer, voire l’application de la directive 55/2001 qui octroie une protection temporaire en cas d’afflux massif, les responsables européens et français préfèrent , accuser les immigrés de tous les maux plutôt que de sauver des vies.
C’est tout simplement insupportable qu’une crise humanitaire déjà pas très bien gérée, vient de basculer dans le drame.
Quand le cout de l’inertie et de l’entêtement politique commence à se compter en vies humaines, c’est un point de non retour qui est atteint.
L’instabilité politique sur la rive sud de la Méditerranée ,pousse de nombreuses personnes à migrer, souvent dans des conditions extrêmement précaires. Le naufrage de ces bateaux nous le rappelle douloureusement.
La situation géographique de Lampedusa fait que ces nombreuses arrivées se concentrent sur un tout petit confetti de terre au milieu de la Méditerranée, qui n’est absolument pas en capacité de gérer cet afflux. Non que le nombre absolu d’arrivées soit insurmontable, mais 20 000 d’entre elles en quelques semaines, sur une île de 5 000 habitants, comportant un centre d’accueil de 800 places occasionne une crise humanitaire certaine . La mission regroupant sur place des équipes de Frontex, de l’UNHCR, de l’OMI et des ONG est complètement débordée et n’est pas soutenue par les autorités italiennes qui laissent pourrir la situation alors même qu’elles ont reçu des fonds pour agir.
Il faut par ailleurs être précis lorsqu’on évoque ces populations migrantes et les amalgames proférés par certains ministres Français et Italiens ne doivent pas faire oublier un élément fondamental. Ces arrivées sont désormais « mixtes », mêlant migrants économiques -notamment les Tunisiens- et réfugiés, notamment des Somaliens, des Erythréens et des Soudanais, qui étaient retenus en Libye, et qui ont obtenu le statut de réfugiés par l’UNHCR. Leur situation, leur statut, les réponses à apporter, sont différents mais complémentaires.
Les outils législatifs et financiers existent pour résoudre cette situation de crise, mais l’attitude du chacun pour soi continue de prévaloir parmi les gouvernements européens. Malgré la pression du Parlement et de la Commission européenne, le Conseil a refusé l’activation de la directive sur la protection temporaire en cas d’afflux massif. Il s’agit là d’une attitude irresponsable. Une fois de plus, les gouvernements sont toujours prêts à coopérer lorsqu’il s’agit de réprimer et aux abonnés absents lorsqu’il s’agit d’activer la solidarité. De même, pour les réfugiés venant de Libye, le dispositif de réinstallation est un outil tout à fait adapté, mais qui n’est pas utilisé.
Ainsi faut-il le redire : la cécité volontaire des gouvernements des Etats membres et leur absence de solidarité sont des facteurs d’explosion. L’Union doit se mobiliser pour gérer la situation des migrants et elle en a les moyens.