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FALLAIT-IL VOTER BROWN ?


Nos voisins britanniques ont voté. Pour une fois, ils eurent trois alternatives : un travailliste, un conservateur et un centriste. A écouter les candidats Brown, Clegg et Cameron (*), il n’était pas évident de distinguer les différences fondamentales des programmes. Surtout, je n’aimerai pas être à la place de l’électeur de gauche au Royaume Uni. Gordon Brown a perdu. Il a clôturé une longue période de 13 années de gouvernement travailliste.

En 1997, le Royaume Uni sortait exsangue de deux décennies de Thatchérisme agressif et sanglant. On pourra porter au crédit du gouvernement Blair (puis Brown) d’avoir pansé quelques plaies, notamment en matière d’éducation et de santé. Margaret Thatcher avait ruiné les services publics du pays.

Mais sur le reste, les “gauchisses” français (dont je suis) n’ont que des motifs de déception.

La politique étrangère du RU fut calamiteuse. Blair n’était pas un Européen convaincu, mais un vulgaire pro-atlantiste qui, à l’instar de Thatcher, est resté dans la posture du « caniche de Bush » : son soutien inconditionnel de la guerre en Irak fut indigne, et l’administration Blair/Brown n’a jamais joué la carte européenne de surcroît.

Il n’est pas anodin de lire dans les colonnes du Monde daté du 6 mai une large tribune de l’héritier de la droite franquiste José Maria Aznar, l’ancien premier ministre espagnol, toute entière consacrée à louer l’action de Tony Blair : « Tony Blair, une référence durable pour l’Europe atlantique ». Aznar défend l’intervention en Irak (qui lui coûta les élections en Espagne après les attentats de Madrid en 2004), et écrit :

« Tony Blair a essayé d’affronter tous ces risques de la façon correcte : en renforçant le lien atlantique et en essayant d’éviter l’unilatéralisme des Etats-Unis et l’isolément européen ; en promouvant un processus de réforme de l’Union européenne qui serve également d’instrument pour rendre plus justes et plus viables les systèmes de protection sociales de plusieurs pays ; et finalement en inspirant des politiques de sécurité et de défense axées sur la promotion de la liberté et du progrès dans le monde entier, et guidées par une vision éthique de la vie humaine indépendamment des circonstances. »

On croit rêver.

La complicité du pouvoir travailliste avec les milieux d’affaires est un second motif de désaccord. Comment appeler autrement une politique qui a favorisé la création des hedge-funds et défiscalisé la finance pour conserver l’attractivité de la City ? L’impôt sur les gains en capital a été ainsi réduit au strict minimum, et le gouvernement blairiste a toujours évité de soutenir les entreprises fragiles (une position favorable aux capital-risqueurs).

Gordon Brown ne méritait peut être pas de payer le prix lourd de la politique blairiste. Il est arrivé tard, et défendait initialement une position plus à gauche (tout est relatif). Mais les dés sont jetés.

(*) on dirait un casting de film…

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