L'agriculture intensive et les OGM pourrissent la France
Qu'on ne se méprenne pas, j'ai pourtant le plus grand respect pour le métier d'agriculteur où je compte beaucoups d'amis. Agriculteur, c'est probablement l'un des métiers les plus utiles et estimables. Evidemment ils travaillent dur, souvent pour des revenus de misère pour certains, est-ce une raison pour se voiler la face ?
En France, il y a une espèce d'Omerta sur l'agriculture. Les agriculteurs sont des sortes de vaches sacrées auxquelles on ne peut pas toucher sans blasphémer. La preuve. Tradition, basses préoccupations électoralistes, peur de perdre les voix rurales, celles de la France profonde… Pourtant, au fur et à mesure de l'industrialisation de l'agriculture, des agriculteurs il y en a de moins en moins… mais électoralement, ça pese environ 15% .
Qu'a-t-on fait de ces agriculteurs ? Des maillons de l'industrie agrochimique, subventionnés jusqu'au trognon, endettés jusqu'au cou, esclaves de leurs donneurs d'ordres et de leurs banquiers. Des boursicoteurs sur les marchés à terme, des pollueurs, voire des empoisonneurs, même si c'est à l'insu de leur plein gré. Pris dans une logique de remboursement de leurs dettes, ils n'ont même plus la possibilité de s'élever et d'avoir un regard critique sur ce qu'il font : de la merde !
Des cochons (ou des poulets) industriels entassés à outrance dans des camps de concentration, bourrés de médicaments, et nourris de soja OGM brésilien obtenu par déforestation. Des poules coincées dans des cages qui pondent sur des bandes transporteuses. Des pommes tartinées de plus de 20 couches de pesticides. Du blé tellement aspergé d'engrais et d'herbicides que le sol est mort. Lisez donc les livres de Fabrice Nicolino !
Tiens, reprenons le problème des algues vertes, le littoral breton est pourri de ces saloperies. Les Bretons ne peuvent même plus boire l'eau de leur robinet, farcie de nitrates.
L'agriculture, dans la bouche de nos politiciens, est censée être le fer de lance de l'économie bretonne : elle est au contraire en train de la faire crever !
Cette affiche choque au point d'être enlevée dans les couloirs du métro parisien mais pas les algues vertes !
La photo de FNE, qui montre un gamin pataugeant dans les algues vertes, est certes choquante. Mais elle n'est pas truquée. Elle a été prise sur l'immense, et normalement superbe, plage de Saint-Michel en Grève, dans les Côtes d'Armor, la plus touchée de la région. C'est là que Fillon, était venu faire un discours en 2009 .
Pour les curieux, voici la carte des zones touchées : il n'y a pas que Saint Michel en Grève et la baie de Saint Brieuc : il y en a partout !
Comme Bruno Lemaire, Fillon refuse de dire le moindre mal des agriculteurs. C'est ainsi que dans son discours sur la plage la plus pourrie de Bretagne, il n'a même pas été foutu d'évoquer une seule fois la responsabilité de l'agriculture dans la catastrophe ! Et on se souvient forcément de la fameuse sortie de Sarkozy l'an dernier au salon de l'agriculture : "L'environnement, ça commence à bien faire". Et la pollution, ça commence pas à bien faire ?
[EDIT 18/02/2011 : le député de Lamballe (en plein coeur du pays du cochon dans les Côtes d'Armor), l'UMP Marc le Fur est l'auteur d'une loi qui a fait passer en 2010 la taille maximale des élevages de porcs de 450 à 900 têtes ! Et son projet initial en prévoyait 2000 ! Hallucinant !
Pourtant, tout le monde le sait, l'agriculture intensive est LA SEULE RESPONSABLE de la situation. Ce n'est d'ailleurs pas un secret, c'est même écrit noir sur blanc sur le site du ministère.
"Le nitrate provient aujourd’hui essentiellement des activités agricoles, notamment de l’épandage d’engrais azoté d’origine minérale ou organique (engrais de ferme, issu des déjections animales : lisier ou fumier - forme liquide ou solide).
En Bretagne :
- 1/3 de l’azote épandu est de l’engrais azoté minéral ;
- 2/3 de l’azote épandu est de l’engrais azoté organique issu des déjections des vaches (57%), porcs (31%), volailles (12%).
Seule une partie de l’azote est absorbée par les plantes, et le reste se diffuse dans la nature (eau, sol, air). L’eau chargée en nitrates ruisselle depuis les champs, rejoint les rivières puis la mer."
C'est clair, non ?
Lemaire, dans sa diatribe contre les pourfendeurs de l'agriculture, prononce cette tartufferie magnifique : "Nous continuerons à les aider à aller vers davantage de bio". Plutôt cocasse de la part d'un ministre qui vient de diviser par 2 pour 2011 la déduction fiscale accordée aux agriculteurs bio !
La vérité est simple : en France, il n'y en a que pour l'agriculture productiviste, qui est parfaitement incompatible avec toute forme d'écologie. (Et je ne parle même pas des OGM !) Il n'y a rien à amender, il faudrait tout rebatir en partant d'une feuille blanche.
Et plutôt que de pourfendre ceux qui ne font que crier leur indignation, les politiciens feraient mieux de s'y mettre. Et je ne parle pas des mesurettes : 134 millions sur 5 ans, principalement pour observer le phénomène (on se contente de mesurer les rejets, pas de les limiter) et faire du traitement esthétique des désagréments (des tracteurs pour ramasser les algues avant l'arrivée des touristes). Pour fixer les idées, 134 millions, ce n'est même pas le coût de l'Air Sarko One (173 millions), et sur 5 ans, c'est 100 fois moins que le coût de la baisse de la TVA sur la restauration…
Rien à voir avec les mesures drastiques qui s'imposent :
- Trouver et juger les andouilles qui ont réussi à concentrer 10 millions de cochons en Bretagne dont 5 sur le seul département des Côtes D'Armor (soit 10 cochons pour un habitant).
- Trouver et juger les profiteurs du système, et confisquer leurs biens mal acquis, au même titre que l'on traque aujourd'hui ceux de Mobutu, Bongo, Sassou, Ben Ali et Moubarak.
- Répartir de manière harmonieuse les élevages sur toute la France. Plus d'élevages, beaucoup plus petits, et plus proches.
- En conséquence, diminuer la consommation de viande. Manger de la viande, cela devrait être festif… Plutôt que de bouffer tous les jours de la saloperie de jambon polyphosphaté, du saucisson plein de graisse, de sel et de conservateurs, ou du steak haché infesté d'Escherichia coli. La bidoche serait évidemment plus chère, mais on ferait coup double en mangeant mieux, moins souvent, et donc moins cher.
On a bien sauvé les banksters à coup de milliers de milliards. On pourrait bien en sortir quelques dizaines pour libérer les agriculteurs du carcan de leur crédit, et les aider à se reconvertir, comme on a reconverti la sidérurgie, et comme on devra reconvertir l'automobile. Reconvertir, que dis-je, à revenir à l'agriculture paysanne, celle qui redonne à l'agriculteur son aura bien mal en point, la seule qui soit "durable".