(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Jean-François MANCEL,
député.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Tout État, pour assurer ses missions, a besoin de s’appuyer sur une fonction publique efficace. Notre pays n’échappe pas à la règle. Cependant, force est de constater que le poids de la fonction publique française est de plus en plus important au point qu’il en arrive à nuire à son efficacité, malgré la valeur de ses agents.
Le rapport Silicani de 2008 sur la fonction publique estime que plus de sept millions de personnes occupaient un emploi de service public en France au 31 décembre 2005, ce qui représente plus de 28 % de l’emploi national total. Concernant le service public administratif, le nombre d’agent a augmenté de près de 25 % entre 1986 et 2006, passant de 4,2 à 5,2 millions. Cette constante augmentation, qui découle en partie d’une forte hausse de l’emploi territorial suite aux processus de décentralisation, génère des pesanteurs au sein de l’appareil public, dommageables autant à celui-ci qu’aux Français.
Nos voisins européens l’ont bien compris et la France est aujourd’hui le seul grand pays développé où il existe encore une séparation totalement étanche entre le statut des fonctionnaires et celui des salariés du secteur privé.
Réformer le statut de la fonction publique en France, en le resserrant autour des fonctions régaliennes, aurait des conséquences hautement bénéfiques.
Tout d’abord, cela contribuerait à dynamiser les domaines non régaliens actuellement englobés dans la fonction publique. En effet, la généralisation du contrat de travail de droit commun permettrait une meilleure prise en compte du mérite ainsi qu’une meilleure gestion des ressources humaines et créerait des ponts entre le secteur public et le secteur privé. Cette nouvelle flexibilité nourrirait une dynamique d’enrichissement réciproque des deux secteurs.
Ensuite, cette réforme du statut aurait un impact non négligeable sur les dépenses publiques au sein desquelles les dépenses de personnel représentent près de la moitié du budget de l’État. À l’heure où le Gouvernement a décidé de ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, une telle mesure viendrait renforcer la volonté de rationalisation des dépenses de l’État.
Enfin, il convient de souligner que les contraintes qui pesaient sur les agents publics au nom du service de l’intérêt général et qui justifiaient les droits spécifiques liés au statut ont perdu beaucoup de leur importance d’origine, ce qui justifie aujourd’hui d’adapter le statut à ce nouvel environnement.
Aussi, la présente proposition de loi vise à réformer le statut de la fonction publique en le limitant aux seules missions régaliennes, revenant ainsi aux sources de ce statut spécifique.
Dans son article 1er, elle modifie et complète les articles 2 et 3 de la loi du 13 juillet 1983 (dite loi Le Pors, portant droits et obligations des fonctionnaires) en restreignant le champ d’application du statut de la fonction publique aux seuls emplois de souveraineté nationale et de puissance publique.
Dans son article 2, elle précise que cette modification ne s’applique qu’aux nouveaux entrants au sein de la fonction publique et non aux agents actuellement en poste afin de ne pas porter atteinte à leur choix initial.
Cependant, il ne faudrait pas fermer la porte à ceux d’entre eux qui souhaiteraient bénéficier du nouveau régime généré par le contrat de travail de droit commun. Aussi, dans son article 3, la présente proposition crée un droit d’option.
Loin de représenter une forme de désengagement de l’État, cette proposition de loi s’inscrit dans une logique d’égalité et de réconciliation au sein de la société française à l’heure où les différences entre le secteur public et le secteur privé apparaissent plus que jamais injustes aux yeux de nombre de nos concitoyens, particulièrement suite à la grave crise financière que nous venons de traverser.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
Les articles 2 et 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires sont ainsi rédigés :
« Art. 2. – La présente loi s’applique aux agents civils des administrations de l’État, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics y compris les établissements mentionnés à l’article 2 du titre IV du statut général des fonctionnaires de l’État et des collectivités territoriales, à l’exclusion des fonctionnaires des assemblées parlementaires et des magistrats de l’ordre judiciaire, qui ont vocation à occuper les emplois définis à la seconde phrase du premier alinéa de l’article 5 bis.
« Les autres agents sont régis par les dispositions du code du travail.
« Art. 3. – Sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents de l’État, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics définis à la seconde phrase du premier alinéa de l’article 5 bis, sont, à l’exception de ceux réservés aux magistrats de l’ordre judiciaire et aux fonctionnaires des assemblées parlementaires, occupés soit par des fonctionnaires régis par le présent titre, soit par des fonctionnaires des assemblées parlementaires, des magistrats de l’ordre judiciaire ou des militaires dans les conditions prévues par leur statut. »
Article 2
Les dispositions de l’article 1er s’appliquent aux agents recrutés à compter de la publication du décret mentionné à l’article 3.
Les agents recrutés avant cette publication peuvent, à leur demande, être régis par les dispositions du code du travail, dans les conditions définies par le même décret.
Article 3
Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application de la présente loi.