Cécile Duflot et Daniel Cohn-Bendit
Europe Ecologie a lancé samedi 16 janvier à Montreuil sa campagne pour les élections régionales. A cette occasion, Daniel Cohn-Bendit a indiqué qu’il espérait au moins 15% des voix au niveau national.
Jusqu’ici tout va bien, car on ne peut décemment pas reprocher à un leader d’un parti politique – même s’il n’est pas lui-même candidat aux élections régionales – de rêver à un succès électoral ou de faire des projections sur les prochaines législatives en 2012.
Seulement voilà, Cohn-Bendit ne s’est pas contenté de lancer la campagne électorale de sa formation politique. Il a aussi nommément désigné l’ennemi. Devant les quelque 1800 militants venus à Montreuil, Daniel Cohn-Bendit a déclaré en effet que l’un des enjeux des régionales est « la fin de l’hégémonie d’un parti dans la gauche et le début d’un véritable partenariat de gestion les uns avec les autres. »
Cette déclaration ne semble pas avoir interpelé outre mesure le microcosme journalistique parisien.Ainsi, pour Europe Ecologie, l’adversaire est donc le PS et non l’UMP de Nicolas Sarkozy. L’objectif des écologistes et de ceux qui se camouflent derrière cette étiquette, est par conséquent l’émiettement de la gauche.
Que n’aurait-on pas entendu si Martine Aubry avait déclaré que l’un des enjeux des régionales était, pour le PS, d’écrabouiller Europe Ecologie ?
L’Elysée peut donc se féliciter de la position officielle d’Europe Ecologie qui lui apporte un renfort pour le moins singulier.
Ceci dit, cette situation n’a rien d’étonnant. On a pu constater l’aveuglement d’Europe Ecologie au sujet de la taxe carbone dont le dispositif a été censuré par le Conseil constitutionnel à la fin du mois de décembre.
Au plan local, l’aveuglement est le même. Par exemple, en Languedoc-Roussillon, les écologistes ont décidé de faire cavalier seul, estimant que l’alliance avec Georges Frêche était inacceptable et prenant dès lors la lourde responsabilité d’un éparpillement des voix de gauche au premier tour.
En Poitou Charentes, la seule réponse politique qu’Europe Ecologie a été en mesure de trouver a été de sanctionner le responsable écologiste Alain Bucherie qui a rejoint la liste d’union menée par Ségolène Royal. Ce dernier a d’ailleurs parfaitement résumé la ligne politique d’Europe Ecologie (nous soulignons) :
« Les Verts deviennent ils un Parti où la logique d’appareil prime sur les individus ; combien de conseillers régionaux sortants ou de militants locaux sincères restent sur le côté, pour laisser la place à des opportunistes labellisées Europe Ecologie ? »
Bref, on le voit, Europe Ecologie vit dans la frénésie de rééditer son succès aux européennes, oubliant qu’un scrutin n’est pas l’autre.
On rappellera aussi que le mouvement écologiste doit sa survie politique et financière au PS. Combien d’élus écologistes doivent leurs mandats au soutien du PS, que celui-ci ait été direct ou se soit concrétisé par un retrait de ses propres candidats ? Si le PS avait vraiment voulu se comporter en parti hégémonique, les Verts n’existeraient plus politiquement. C’est aussi simple que ça.
Peut-on penser raisonnablement que Marie-Christine Blandin aurait pu être présidente de la région Nord Pas-de-Calais sans l’appui du PS ? Non évidemment. Il en va de même de la présence de parlementaires écologistes au Palais Bourbon (De Rugy, Billard, Mamère, Cochet) et au Palais du Luxembourg (Blandin, Voynet, Muller, Desessard, Boumedienne-Thiery).
On voit dès lors que la stratégie des dirigeants d’Europe Ecologie est de stigmatiser le Parti socialiste alors que ce dernier les a toujours aidés. C’est ce qui s’appelle cracher dans la soupe.
On peut même aller plus loin en se demandant s’il ne s’agit pas pour les leaders écologistes de préparer les esprits à un renversement d’alliance, étant entendu qu’en politique comme ailleurs, il est parfois plus facile de dire contre qui on est, plutôt que de devoir annoncer avec qui on va aller.
Mais on en reparlera certainement après les résultats des régionales lorsque les écologistes auront déchanté.